Aller au contenu

Le trouble bipolaire

  • 10 min

Découvrez le trouble bipolaire : types, symptômes de manie et de dépression, prévalence, traitements efficaces et conseils pour aider une personne vivant avec ce trouble.

Partagez sur

Tout le monde vit des hauts et des bas, mais dans le cas du trouble bipolaire les personnes qui en sont atteintes vont osciller entre des périodes d’intense activité (la manie) et des épisodes de dépression majeure. Il s’agit alors d’un trouble bipolaire. Il existe deux types de trouble bipolaire, le type I et le type II. Le type I est anciennement connu sous l’appellation de maniaco-dépression ou psychose affective. On parle alors d’épisodes francs de manie couplés à un ou des épisodes de psychose. Quant au type II, on rencontre au moins un épisode de dépression majeure et au moins un épisode d’hypomanie (mais pas d’histoire de manie ni d’épisode psychotique). En général, l’épisode d’hypomanie n’entraine pas d’altération marquée du fonctionnement social ou professionnel et ne nécessite pas une hospitalisation1. On rencontre dans le type II, des états mixtes2 très fréquents.

Les symptômes

Un épisode de manie se reconnaît à la présence pendant au moins une semaine (pour l’hypomanie, au moins quatre jours consécutifs) de plusieurs des éléments suivants :

  • des idées de grandeur ou un accroissement important de l’estime de soi;
  • une diminution du besoin de dormir (par exemple les personnes se sentent reposées après seulement trois heures de sommeil);
  • une volubilité plus grande que d’habitude ou une pression du discours (l’individu coupe les autres, ne cesse de parler, etc.);
  • une accélération de la pensée, parfois au point où la personne se perd dans ses idées;
  • des problèmes d’attention, la personne étant tellement distraite par tout et par rien qu’elle peine à garder l’attention sur un sujet;
  • une augmentation soutenue des activités (professionnelles, sociales, scolaires ou sexuelles);
  • un engagement excessif dans des activités à risque de conséquences graves, par exemple, des dépenses inconsidérées, des activités sexuelles à risque, des investissements risqués ou hâtifs, etc3.

Pour ce qui est des symptômes dépressifs, voir la rubrique sur le trouble dépressif majeur.

Quels sont les taux de trouble bipolaire dans la population?

Pour le type I, autant d’hommes que de femmes présentent ce trouble, mais pour le premier épisode chez les hommes, il s’agit plus souvent d’une manie, et chez les femmes, d’une dépression. Il semble y avoir plus de risque chez les femmes, pour ce type de trouble bipolaire, de présenter également un trouble des conduites alimentaires. Il y aurait environ de 0,5 à 1,6 % de la population qui présenterait un trouble bipolaire de ce type au cours de leur vie. Il serait plus fréquent dans les pays dont les revenus sont plus élevés, excepté pour le Japon où le taux de prévalence est très bas (0,01 %)4. Les personnes peuvent vivre plusieurs épisodes, dans des périodes variant de 2,7 à 9 ans environ. En vieillissant, les épisodes seraient plus courts. L’âge de la survenue se situerait entre 20 et 30 ans. Aux États-Unis, la moyenne d’âge de la survenue serait de 22 ans, avec une moyenne légèrement plus faible chez les femmes (21,5 ans) que chez les hommes (23,1 ans)5.

Pour le type II, il y a également autant d’hommes que de femmes qui en souffrent. Cependant les femmes rapportent plus d’épisodes d’hypomanie avec états mixtes que les hommes. Une certaine proportion d’entre elles vivent un épisode d’hypomanie à la suite d’un accouchement. La prévalence à vie se situerait à 0,5 %. Il arrive qu'il débute à la fin de l'adolescence, mais en général à la mi-vingtaine.

Le risque suicidaire chez les personnes ayant un trouble bipolaire est de 20 à 30 fois plus grand que la population générale. On estime que de 5 à 6 % des personnes vivant avec ce trouble vont mourir par suicide surtout lorsqu’elles traversent un long épisode dépressif6.

Comment traiter ce trouble?

Les formes de traitement les plus répandues sont les médicaments et la psychothérapie. En général, des stabilisateurs de l’humeur sont prescrits. Le traitement de base est relié aux médicaments normothymiques ou thymorégulateurs, dont le lithium, un sel minéral qui a la propriété de stabiliser l’humeur rapidement. Il est efficace chez environ 80 % des cas, mais il exige toutefois des contrôles sanguins réguliers afin de bien doser la médication. Pour le trouble de type I il n’est pas rare que la personne se voie prescrire un antipsychotique. La majorité des personnes qui composent avec un trouble bipolaire, une fois stabilisées, reprennent leurs activités antérieures. Mais pour ce faire, d’autres interventions sont nécessaires que la médication seule.

Une des approches qui a démontré son efficacité tant pour le trouble de type I – en conjonction avec de la médication – que pour le trouble de type II en monothérapie (sans médication) est la psychothérapie interpersonnelle et des rythmes sociaux (PTIRS)7. Il s’agit de la combinaison de la psychothérapie interpersonnelle pour la dépression et d’une approche psychoéducative, en général offerte en groupe, pour aider à augmenter la régularité des routines quotidiennes. Les prémisses étant que les personnes présentant un trouble bipolaire sont fondamentalement vulnérables aux dérèglements des rythmes circadiens du sommeil. Des stresseurs psychosociaux interagissent avec cette vulnérabilité dans le développement de symptômes d’hypomanie ou de manie (par exemple la naissance d’un enfant) qui perturbent les rythmes sociaux de la vie quotidienne. Ce n’est évidemment pas la naissance de l’enfant comme telle qui en est responsable, mais le fait que l’enfant pleure durant la nuit, ce qui occasionne de fréquents réveils chez la personne vivant avec le trouble, et interfère ainsi avec les rythmes circadiens de son sommeil. À son tour cette interférence peut provoquer une rechute de manie ou d’hypomanie. La thérapie des rythmes sociaux s’appuie sur le rationnel que des « rythmes sociaux stables engendrent une plus grande stabilité de l’humeur »8

Par ailleurs des relations interpersonnelles problématiques – fréquentes dans le cas de ces troubles – ou encore des cédules de travail irrégulières – peuvent engendrer une instabilité des rythmes sociaux. Les prémisses sont à l’effet que l’apprentissage d’une vie ordonnée et une résolution efficace des conflits interpersonnels vont correspondre à une intégrité du sommeil – dont les conseils de dormir tant d’heures par nuit, toujours aux mêmes heures – ce qui va permettre une diminution du risque de vivre d’autres épisodes.

Comment agir?

Bien entendu les proches – ou les employeurs le cas échéant – ont un rôle important à jouer dans la réponse aux difficultés reliées à ce trouble. Par exemple des proches avisés, connaissant bien les aspects entourant ce trouble, seront plus aidants que des proches réagissant fortement aux comportements inhabituels de la personne. Il faut savoir par ailleurs que les épisodes de manie ou d’hypomanie sont en général euphorisants (les personnes vivant avec ce trouble, dans de telles phases, sont pleines d’énergie, ont de nombreux projets en tête, etc.). Elles sont donc réticentes à comprendre, durant ce type de phase, qu’elles doivent avoir une vie plus ordonnée et régulière. Mais plusieurs personnes rétablies de ce trouble acceptent d’adopter de saines habitudes de vie car cela leur procure un bien-être et une stabilité leur permettant d’avoir de meilleures relations avec leur entourage, et elles savent pertinemment que des épisodes dépressifs suivent ces phases d’excitation.

  • Tous les excès de comportement sont troublants et lors d’une première crise, vous risquez d’être confus puisque vous ne comprendrez pas ce qui se passe et pourquoi l’état de votre être cher ne s’améliore pas de lui-même. Dès lors, il est important de faire preuve de patience malgré la frustration que vous pouvez ressentir. Il faut encourager votre être cher et lui montrer que vous comprenez les difficultés causées par son trouble, et lui manifester que vous avez confiance en sa guérison. Écoutez-le plutôt que lui prodiguer des conseils.

  • En phase dépressive, validez ses émotions et son expérience. N’hésitez pas à demander à votre être cher s’il a des pensées suicidaires. Si ces idées sont sérieuses, n’hésitez pas à contacter un centre de prévention du suicide pour qu’il reçoive de l’aide, et éventuellement pour vous-mêmes.

  • En phase de manie, vous pouvez dire à votre être cher que vous ne comprenez pas ce qu’il essaie d’exprimer parce qu’il parle trop vite. Dans des situations où il y a présence d’attitudes agressives, vous ne devez pas les tolérer. Mais restez calme et soyez directif. Vous pouvez lui dire : « Je n’accepte pas ton comportement agressif, tu n’es plus en contrôle car tu n’agis pas ainsi d’habitude ». Ce genre de remarque peut aider votre être cher à rester en contact avec la réalité.

  • Lorsque la situation est stabilisée, il est important de déterminer avec votre être cher ce qui semble trop le stimuler ou le stresser dans la vie quotidienne. Ces discussions vous fourniront des informations utiles pour établir des stratégies de prévention. Par exemple on peut aider son être cher à établir un plan de rétablissement où les signes avant-coureurs d’une rechute (manque de sommeil, état d’excitation, débit plus rapide de la parole, etc.) sont notés. Cela vous permettra de reconnaitre ces signes avant-coureurs. Plusieurs proches établissent également un contrat avec leur être cher pour les diverses étapes à suivre en cas de rechute.

  • Si des enfants sont impliqués dans le quotidien de votre être cher, il est important qu’on leur explique la situation car ils peuvent se créer des scénarios pires que la réalité et ainsi développer un sentiment de culpabilité. Faites-vous soutenir dans cette démarche et allez chercher de l’aide pour vous aider à établir vos limites. Dans certaines associations de proches, il existe des programmes pour aider les enfants dont un parent présente un trouble de santé mentale. Vérifiez si l’association de votre région offre de tels programmes.

Que dois-je éviter de faire?

En période de dépression et malgré votre désir de voir votre être cher se rétablir, évitez de le blâmer pour sa façon de se sentir ou encore de lui dire de se prendre en main. Ces façons de faire ne pourront qu’accentuer son sentiment de culpabilité et de solitude. Évitez de fournir des efforts exagérés pour lui remonter le moral et de lui laisser entendre que la situation pourrait s’améliorer s’il sortait de sa torpeur.

En phase de manie ou d’hypomanie, ne vous laissez pas leurrer par l’exaltation de votre être cher. S’il devient soupçonneux, il faut éviter de discuter avec lui puisqu’il risque de devenir colérique. L’accuser d’être malade ne règlera en rien la situation. Enfin, il est inutile de lui demander de se calmer.

Vivre avec une personne en phase de manie peut entraîner des problèmes financiers importants au sein d’une famille. Il est donc capital d’aller chercher de l’aide pour s’outiller et éviter de tomber dans un engrenage de problèmes financiers.

À retenir

Le trouble bipolaire est un trouble de l’humeur qui comporte des épisodes de dépression, de manie (type I) ou d’hypomanie (type II). Une fois stabilisées, les personnes en général reprennent leurs activités. Encouragez votre être cher à consulter tout en adoptant une méthode douce de compréhension et de non-jugement.

Sources et notes

Avez-vous aimé ce contenu ?

Des profils similaires au vôtre ont aussi aimé